éditions Théâtrales Jeunesse

Jojo au bord du monde

de Stéphane Jaubertie

Carnet artistique et pédagogique

Il nous paraît judicieux de commencer à faire lire Jojo au bord du monde dès le cycle 3 puis de le proposer, sous forme d’extraits dans un groupement de textes ou à l’occasion d’une lecture cursive, durant les années de collège, années de la métamorphose des élèves en adolescents, années propices au questionnement de ces jeunes qui grandissent et observent parfois leur famille se décomposer, se disloquer pour se recomposer ensuite.

Pour le cycle 3 :

On s’intéressera aux évocations de la famille et des origines à travers les thématiques du rapport entre générations et de la transmission qui hante la pièce.

Activités

Établir l’arbre généalogique de la famille : réflexion autour de la composition de la famille contemporaine et aux problèmes engendrés par ces nouveaux modes de vie (famille monoparentale, recomposée…). Proposer des débats sur l’évolution de la cellule familiale, sur l’évolution des rapports entre les membres d’une même famille : que faire de nos aînés ? Comment s’occuper de ces adolescents quand la société nous pousse à être individualiste, égoïste et à profiter au maximum des plaisirs de la vie ?
Proposer aux élèves de mener des enquêtes auprès des membres de leur famille pour mieux connaître les lieux, les rencontres, les métiers et le mode de vie, tout ce qui a constitué le fondement de la société de nos ancêtres proches ou plus éloignés, enquêtes qui permettent de prendre conscience de l’évolution de cette sphère familiale. (Lancement de l’enquête à partir de l’évocation de lieux, d’objets chers à la famille depuis des générations, les photographies de famille. Objets qui peuvent être le point de départ d’une situation d’écriture (Voir les poèmes de Ponge ; Perec et Je me souviens).
Restitution des interviews en classe sous la forme de dialogues ou de récits : travail d’écriture par duos, le premier raconte à l’autre son interview, qui prend des notes et réécrit ces propos sous une forme narrative. Les textes seront lus en classe.
D’autres exercices d’écriture peuvent également permettre l’expression de soi à travers le récit d’expériences personnelles liées à l’aventure, au dépassement de soi, à ce qui est arrivé un jour d’inhabituel, d’insolite ou d’extraordinaire pour soi, comme la rencontre de Jojo avec cette « fée ». Raconter un événement incroyable qui a bouleversé votre vie à jamais.

Jojo au bord du monde, c’est aussi la possibilité d’apprendre à grandir en étant plus fort que ses craintes, que ses peurs : on peut conduire les enfants à raconter ou à lire leurs angoisses, et ce qui les aide à les surmonter. Parler ensemble de ces peurs d’enfant, les comparer, mettre des mots sur elles, en rire ; cela peut les aider aussi à évoluer ensemble dans la classe. Cela nous renvoie à toute cette littérature qui permet aux enfants d’apprivoiser leurs angoisses, aux contes de fées qui font frissonner ces enfants qui adorent se faire peur. Un travail de confrontation entre différents textes pourrait donner lieu à la création d’un réseau lecture abordant les bienfaits et les vertus des histoires effrayantes qui permettent aux lecteurs de se confronter à leurs propres peurs et angoisses en leur montrant qu’il est possible de les surmonter.

On peut aussi alimenter ces propositions de travail par la lecture en classe d’extraits d’ouvrages qui évoquent le lien entre jeunes et vieux avec les non dits (sur la shoah par exemple) et le parcours découverte du jeune qui prend conscience de ce poids familial dans sa propre constitution identitaire.

Pour les niveaux du collège

Dans le cadre de l’étude de la narration et du conte en particulier

Jojo au bord du monde peut être intégré / associé dans une séquence autour des récits d’enfance et de l’expression des sentiments personnels. Ou encore dans une séquence autour de l’expression du souvenir et de la mémoire.

En classe de 6ème

Lors d’une séquence consacrée au conte, on peut s’intéresser aux références faites à ce genre dans la pièce à travers les personnages rencontrés. Les élèves s’interrogent sur leur caractérisation et sur leur mode de vie dans la pièce. Ils notent les différences avec les personnages des contes traditionnels dont ils sont issus. Certains personnages comme Batman relèvent d’un autre fond culturel sur lequel on peut amener les enfants à se documenter et à réfléchir.
En écriture longue, les élèves peuvent imaginer une histoire dans laquelle un personnage imaginaire de conte ou un super héros interviendrait aux côtés des personnages réalistes et contemporains. Ils s’interrogeront alors sur les déformations, les modernisations, les transformations à effectuer sur les modèles traditionnels du personnage merveilleux ou fantastique, sur l’ancrage de cette culture dans notre quotidien. Ils s’interrogeront sur ces héros qui nous accompagnent dans la constitution de notre imaginaire et en font partie intégrante.
Se raconter des histoires plus ou moins réalistes, créer des personnages merveilleux, prendre le temps de se rencontrer et de se parler, c’est ainsi une façon de conjurer le temps qui passe si vite, Jojo en a déjà conscience.

Autour de la notion de personnage : la construction du personnage et de son intériorité

En grammaire et en orthographe
Repérage des pronoms personnels. Étude de l’utilisation des pronoms et de leurs valeurs.
Relevé des temps employés : repérage du présent de l’indicatif et du passé composé : étude des valeurs de chaque temps. Étude du dialogue.

Vocabulaire et lexique : Travail autour de la parole et du langage.
De jeunes enfants seront sensibles à l’humour du texte : un travail sur la langue s’offre aux enseignants qui s’amuseront avec leurs élèves à relever, expliciter les expressions imagées dans le texte et surtout le détournement ou la déformation dont elles font l’objet. Puis ils pourront inventer de nouvelles transformations à partir d’images existantes. Les catalogues de mots fonctionnant par association d’idées, comme les créent les personnages de la pièce, peuvent servir de support à une expression poétique.

  • Travail de création autour des expressions familières, populaires que l’on détournera. Effet d’humour à analyser. Passer du sens propre au sens figuré.
  • Écriture de sigles en détournant le sens : RMI par exemple.
  • Classer les expressions et le vocabulaire en fonction du niveau de langue utilisé par les personnages. Jouer à créer/trouver d’autres mots appartenant à d’autres niveaux de langue.
  • Les figures de style : comparaison, métaphore, alliance de mots…

Expression orale
Travail sur la diction, l’articulation. Travail sur l’intensité et le rythme.

Arts plastiques
Autour de l’objet et de sa fonction. La symbolique des objets de la représentation. Travail sur le corps écran avec projection d’images photographiques ou de vidéos.

En classe de 3ème, deux orientations pédagogiques sont possibles

  • Prolongement de l’étude de l’autobiographie en général.
  • Point de départ d’une étude de théâtre ou d’un groupement de textes sur le théâtre.

On peut amener des élèves de 3ème à lire Jojo au bord du monde en rapport avec l’objectif d’étude des récits de soi et des sujets d’écriture autobiographique comme pendant à l’étude de textes du programme. Jojo peut amener les élèves à parler de soi avec humour et lyrisme tout à la fois, pour rester fidèle au style de la pièce ; il permet l’évocation des premières expériences d’amour et d’amitié, aventures plus ou moins dangereuses, rencontres avec l’inconnu, tout ce qui scande la marche vers l’âge adulte. Les différences d’âge entre les deux héros, Jojo et Jilette, conduisent à aborder la fuite du temps et la place du souvenir dans toute vie humaine.

Les plus grands de 3ème seront sensibles également à l’humour et l’ironie constamment présents dans le texte. Les personnages font référence à des héros jeunes mais leurs problématiques sont celles d’adultes qui n’en ont pas fini de grandir et de chercher à résoudre leurs problèmes depuis l’enfance, sans parler de Jilette, la mamie qui n’est pas loin de retomber en enfance et a peur de mourir.
De même, les travers de notre société sont passés au crible des répliques de Jojo et des autres principaux protagonistes. La satire des tendances de notre société à s’exprimer à tort et à travers sans discernement ni distance se fait mordante à la clinique du Docteur Demal.

En lien avec l’argumentation et la pratique du débat que les élèves doivent acquérir à la fin de leurs années de collège, le professeur peut les pousser à s’exprimer et à réagir sur la caricature que propose l’auteur de la psychologie moderne qui envahit nos existences et sur la critique de notre société de consommation individualiste. Les élèves trouveront des arguments pour infirmer ou non les propos de l’auteur et s’exprimeront sur ce qui constitue pour eux des références et des modèles de vie.