éditions Théâtrales Jeunesse

Le bruit des os qui craquent

de Suzanne Lebeau

Carnet artistique et pédagogique

Les exercices préparatoires gagnent à ne pas être décrochés du texte théâtral que l’on veut travailler. Aussi, on peut prélever dans le texte quelques phrases fortes, distribuer une phrase par élève (différente pour chacun ou 5 ou 6 phrases différentes pour 25 élèves), demander sa mémorisation rapide, puis par groupes de 6 élèves maximum :
Venir dans l’espace de jeu, se mettre en ligne dos aux spectateurs, au signal se tourner vers les spectateurs pour dire sa phrase chacun à son tour et suivant une intention donnée par le professeur. On peut donner 3 intentions différentes pour chaque groupe de joueur qui fera ainsi l’essai pratique des modifications qui s’imposent et des interprétations différentes sur une même phrase si l’on veut suivre une intention. Cet exercice permettra en outre de se confronter pour les élèves à leur voix et à leur présence physique devant les autres ainsi qu’aux émotions.
Il ne faut pas avoir peur de faire essayer des intentions très tranchées pour que les élèves ressentent de façon sensible ce qui semble adapté et ce qui relève du choix d’interprétation.

  • Par exemple : « Je viens témoigner pour Elikia Mandoke » (p. 18) : en colère, fier, accusateur
  • « Des petites filles avec des armes ! » (p. 46) : dans une colère sourde, avec amertume, incrédule

    À essayer sur bien d’autres phrases et intentions de jeu sans oublier le passage par des intentions de jeu qui paraissent moins adaptées (dire ces phrases en étant heureux, dans l’exagération, le pathos…) ce qui permet de mesurer, tester par soi-même un mode de jeu adapté à l’écriture proposée.

Suivant l’âge des élèves, suivant leur appréhension du texte à la lecture intégrale de l’œuvre et au fil des différents travaux et débats réalisés autour de la pièce, on choisira des extraits plus ou moins longs et plus ou moins descriptifs quant aux conditions de vie des enfants soldats.
On peut faire de premiers essais de mise en voix, ce texte dans sa structure se prête particulièrement à une mise en voix et en espace.

Proposer aux élèves (par petits groupes) de réfléchir à une mise en espace possible pour pouvoir faire une lecture à voix haute texte en main, à l’aide éventuellement de très peu d’accessoires ou mobilier. Le bénéfice dans un premier temps de la lecture texte en main, derrière un pupitre, derrière une chaise, assis sur une table… est de rassurer et « d’occuper » le corps du lecteur.
Situer l’espace d’Angelina (espace de la comparution) par rapport à l’espace de la parole récit (de Joseph et Elikia) par rapport à l’espace de la parole directe (de Joseph et Elikia).
Pour travailler avec la classe entière il faut envisager des « chœurs » d’Angelina, des chœurs de Joseph et d’Elikia, en revanche une proposition pour plus de force, de clarté et pour donner à entendre les différents types de parole du texte, serait de n’avoir qu’un lecteur pour la parole directe d’Elikia, idem pour la parole directe de Joseph.

On peut s’essayer à la scène I suivie de la Première comparution. Pour un plus long temps de lecture, il ne faut pas hésiter à donner à lire des fragments choisis et non successifs pour avancer dans le texte. Il va falloir se poser avec les élèves certaines questions, pour lesquelles et pour beaucoup d’entre elles, il est toujours plus efficace de tenter de répondre par des essais sur l’espace de jeu.

  • Il faut une répartition préalable du texte pour les multiples Angelina, Joseph et Elikia. Il n’y a pas de répartition idéale : une phrase ou deux par lecteur successivement, en la laissant au choix et à l’organisation du groupe de lecteur concerné…
  • Il faut réfléchir à la prise en charge de la lecture des didascalies : Se poser la question de leur fonction et nécessité lors de la lecture, par un groupe spécifique de lecteur, par un seul… ?
  • Une lecture à voix haute suppose un auditoire et doit être adressée (cette adresse est physique, charnelle mais rejoint les différentes formes d’adresse contenues dans l’écriture) il faut veiller au volume sonore, aux consonnes, au rythme… tout ce qui participe à la réception possible par un auditoire. Que veut-on dire et que veut-on provoquer sur le récepteur ? User du langage imagé pour faire émerger le sens avec des jeunes est bien souvent très pertinent.
  • Avec l’adresse on peut se poser la question du regard, de l’orientation du corps : les lecteurs de la parole récit sont-ils face au public, s’adressent-ils dans son dos à Angelina comme pour lui donner la parole à transmettre… les lecteurs des paroles directes sont-ils face à face, face public… ?
  • Le regard, l’orientation du corps des Angelina définissent la place de la commission à laquelle elle s’adresse, est-ce le public ?
    Des essais différents en direct seront pertinents pour prendre des décisions et mesurer l’impact sensible des regards et des postures et l’effet que l’on cherche à produire.

Les photos de différentes mises en scènes (proposées dans le carnet artistique par exemple) et leur lecture peuvent être utiles pour enrichir les réflexions, se poser des questions, voir des exemples… ou pour travailler sur l’espace et une approche de la scénographie au théâtre : ce que raconte/propose un espace, de quelle nature est-il réaliste, symbolique… ? quelle place pour le corps des acteurs…