éditions Théâtrales Jeunesse

Ma famille

de Carlos Liscano

Carnet artistique et pédagogique

Analyser certaines caractéristiques du texte, en feuilletant le livre.

a) Didascalie d’ouverture : Demander aux élèves de lire la didascalie liminaire (celle qui ouvre la pièce, en page 6). Relève-t-elle de la régie ou de la fiction ? Pourquoi ? Selon Bernanoce, « la fiction désigne ce qui, dans une pièce de théâtre, concerne les personnages dans la figuration fictive, tandis que la régie les fait vivre explicitement dans ce qui serait la mise en scène de cette fiction [1] ». On remarque que ce texte donne des indications de décor, de costume et de jeu. Cette didascalie aide à l’imagination de la dynamique de la scène, voire de la mise en scène en elle-même.

b) Polyphonie : Comment les multiples voix sont-elles représentées à travers la distribution des personnages ? On notera que le personnage principal, les personnages secondaires ainsi que les autres voix sont interprétés par une actrice et trois acteurs en alternance. S’ajoutent à cela des personnages masculins et féminins qui pourront être interprétés par des acteurs ou des actrices, sans que le genre ne soit défini. Cette polyphonie relève d’une certaine métathéâtralité, dans la mesure où l’interchangeabilité des personnages est implicite sur scène : en effet, les acteurs et l’actrice racontent ensemble une histoire à la première personne, comme un « récitant » (un personnage prenant en charge, un peu à la manière d’un narrateur, le récit de l’action à l’adresse du public, participant d’une esthétique épique [2]). On assiste alors à un dédoublement fictionnel, par lequel les interprètes agissent en tant que personnages durant les passages de « représentation » et redeviennent récitants pour prendre en charge les passages de « récit ». Ces deux moments qui découpent le texte relèvent certes d’un jeu de mise en scène : d’un côté, ce que l’auteur appelle « récit » correspond au moment de la narration (c’est-à-dire, l’action de raconter au public une histoire qui s’est déroulée au passé) ; de l’autre côté, ce qui est nommé « représentation » présente hic et nunc des situations vécues au passé.

Autre particularité qu’il est important de souligner : les voix et les personnages n’ont pas de noms propres, mais ils sont désignés par leur place dans la famille ou leur statut social (rôle du Père, rôle de la Femme aux chats, rôle du Camionneur, rôle du Responsable du dépôt, etc.). Est-ce une façon de les « déshumaniser » par l’absence de prénom, puisqu’ils font partie d’un monde qui gravite autour du commerce de personnes ? Ainsi, les individus se voient moins comme des personnalités uniques mais plutôt comme des marchandises interchangeables, ou des automates, réduits à leur fonction.

c) Composition en deux registres : Observer la composition des scènes, qui articulent une division entre « récit » et « représentation » (passé et présent, respectivement), à partir de la lecture collective d’un extrait (par exemple, de la page 7 jusqu’au début de la page 13 – avant le « Récit »). Pour cela, partager la classe en quatre sous-groupes, qui liront en chœur les répliques respectives à l’acteur 1, 2, 3 ou l’actrice. Dans le Glossaire (consultable à cette adresse : https://www.editionstheatrales.fr/pedagogique/glossaire.html), on pourra exploiter également les définitions de « mise en scène théâtralisée / mise en scène épique », « mélange épique / dramatique », « adresse et double énonciation » et « auteur, acteur, personnage, narrateur ou récitant, locuteur ».


[1Marie Bernanoce, À la découverte de cent et une pièces, Montreuil, éditions Théâtrales, 2006, p. 507.

[2Marie Bernanoce, À la découverte de cent et une pièces, Montreuil, éditions Théâtrales, 2006, p. 507.