éditions Théâtrales Jeunesse

Le Syndrome de Gaspard et autres Petites enquêtes sur la vie des gens

de Hervé Blutsch

Carnet artistique et pédagogique

L’un des problèmes auxquels se heurte le théâtre d’Hervé Blutsch, s’agissant en particulier de ce recueil, est celui de l’incarnation. En effet, les personnages qui apparaissent dans ces textes ne sont pas des individus psychologiquement cohérents comme on peut en trouver dans des romans soi-disant réalistes, mais se présentent plutôt comme des figures tel que pouvait l’être le Père Ubu d’Alfred Jarry. C’est pourquoi le simple fait d’utiliser un acteur ou une actrice pourrait faire dévier la représentation vers un réalisme préjudiciable à l’angle symbolique privilégié par Blutsch. Cette volonté de dépasser une certaine et illusoire copie du réel se remarque d’ailleurs dans les enregistrements que l’auteur fait de ses propres textes, dans lesquels il déforme volontiers les voix des comédiens ou la sienne, les rendant semblables à celles de cartoons.
Comment faire éprouver cette problématique sur le plan scénique ? On peut penser au théâtre de marionnettes, susceptible d’instaurer une distance intéressante entre la pièce et le spectateur. Le choix du « Clos Sainte-Marie », l’un des textes les plus noirs du recueil, peut fournir à ce titre un terrain d’expérimentation fécond.
Tout commence par l’élaboration d’une marionnette. On peut choisir de se lancer dans un projet d’envergure et aller vers la fabrication d’une marionnette à bouche mobile, qui peut se confectionner avec une chaussette, une moufle, un gant de toilette, etc. Cependant le/la professeur-e pourra aussi opter pour un dispositif plus léger en donnant aux élèves de simples yeux de marionnettes à main, transformant instantanément cinq doigts en une figure imaginaire. Concernant l’extrait travaillé, cinq personnages sont en jeu : Jean-Claude Suco, un collabo, un résistant, Maurice Blanchot et Jeanne Barbey. Plusieurs tables renversées à la verticale pourront faire office de castelet.
Une fois ce cadre installé, la séance de mise en jeu peut être orientée vers l’apport spécifique de la marionnette dans le théâtre de Blutsch :
On fait passer trois versions différentes de l’enquête :

  • Une version jouée par des acteurs et actrices « humains » ;
  • Une version jouée par des marionnettes ;
  • Une version mixte jouée par des humains et des marionnettes ; on peut imaginer que Suco soit joué par un humain et les autres personnages par des marionnettes ou inversement.
    À partir de ces trois versions, un bilan peut s’organiser autour des questionnements suivants :
  • Avez-vous noté un changement de registre d’une version à l’autre ?
  • Quels registres avez-vous repérés ? Comique ? Dramatique ? Étrange ?
  • Quelle version avez-vous préférée et pourquoi ?

Le/la professeur-e aura beau jeu de poursuivre la réflexion en proposant aux élèves un ou plusieurs extraits de Sur le théâtre de marionnettes de Kleist