éditions Théâtrales Jeunesse

Petit Pierre

de Suzanne Lebeau

Carnet artistique et pédagogique

Un des axes majeurs à aborder lors de l’étude de l’écriture de Petit Pierre réside dans l’analyse des paroles des deux conteuses.

On aborde en premier lieu leur statut.

Elles disent « je » lorsqu’elles sont porteuses de la mémoire et des sentiments de l’humanité :

« Je cours sur tous les fronts,
Au nord, au sud, à l’est, à l’ouest.
Je ramasse les larmes, les cris,
Les derniers soupirs… » (page 19).

Ce sont des personnages de la pièce quand occasionnellement elles s’adressent directement aux personnages ou parlent à leur place :

« Remplis son assiette, Mariette,
Il est maigre comme un clou. » (page 37).

Elles sont aussi l’incarnation d’idées ou de notions abstraites. Elles ont une existence avec des caractéristiques abstraites particulières. Suzanne Lebeau leur donne au début du texte les traits suivants :

« La conteuse 1 serait le point de vue de la grande histoire,
La conteuse 2, de la petite histoire. »

La parole est ainsi distribuée, on en trouve facilement illustration au cours de la pièce :

« Conteuse 2 : Pour la première fois, Petit Pierre est seul avec ses vaches. » (page 48)
« Conteuse 1 : J’ai peur du nazisme
Qui crache son venin dans les haut-parleurs des places publiques. » (page 48).

Mais au fil des séquences, cette parole se mélange et se mêle le plus souvent :

« Conteuse 1 : Presque chez lui
Les garçons de ferme connaissent le chemin de l’étable
Et le maître se couche tôt.
Conteuse 2 : Ce soir, Petit Pierre les attend,
Le sourire aux lèvres.
Il les entend,
Comme tous les soirs. » (page 39).

Dans cette séquence, toutes les deux parlent de Petit Pierre.

De même, on peut établir de notables différences selon les séquences et leur contenu dans la longueur ou la brièveté de leurs paroles. Il faut faire prendre conscience aux enfants que cela crée un rythme très différent avec des accélérations ou des ralentissements à l’image du mouvement du manège.

L’évocation des faits du monde comme ceux de Pierre prend une certaine longueur dans la bouche des conteuses sauf à certains moments pour provoquer dans l’échange de propos brefs parfois un mot un rythme beaucoup plus rapide :

« Conteuse 1 : … le lait.
Conteuse 2 : Il choisit une planche….
Conteuse 1 : … pour faire le pré. » (page 58)

S’il souhaite aborder plus précisément le contenu de leurs propos, l’enseignant donne un corpus des paroles des deux conteuses pour que les enfants distinguent ce qui est de l’ordre du récit de la vie de Petit Pierre et ce qui évoque des faits historiques. Il faut sans doute proposer une mise en contexte rapide de ces faits du XXème siècle auprès des enfants. L’intérêt de ces évocations réside dans la mise en évidence de la manière dont Petit Pierre appréhende et ressent lui-même ces faits, qui lui parviennent comme dans un brouillard de sons et d’images. Les enfants établissent le rapport entre les étapes de la création artistique du manège de Petit Pierre et les horreurs du siècle. On propose de réaliser une frise chronologique qui se développerait au fur et à mesure que la terre tourne et que le temps s’écoule dans la lecture de la pièce.

Par ailleurs, l’enseignant peut demander aux élèves de retrouver les passages de la création progressive du manège et à l’écrire en reprenant les phrases des conteuses.