éditions Théâtrales Jeunesse

Les Abîmés

de Catherine Verlaguet

Carnet artistique et pédagogique

Recherches de mise en jeu de la page 64, de « Chez Anna, j’y passe trois années », à la page 71.

1. Répartition du texte

Que ce travail soit présenté ou non, il s’agira de donner l’impression que le public est le confident de Ludo et Faïza, complices, comme seuls au monde : de faire de la contrainte du grand nombre d’acteurs une source d’expressivité, trouver quels moments seront plutôt joués en chœur, ceux en un seul duo, pour toucher le public et lui faire sentir la solitude de Ludo face à sa vie, son passé qui ne passe pas bien et cette amitié touchante avec Faïza.

Le mieux serait de faire trouver ces choix par tâtonnements successifs, en insistant sur le fait que le critère premier n’est pas l’équité dans le nombre de répliques de chacun ; que dans une scène aussi intime, le jeu (un simple regard continu, un sourire, l’expression d’une compassion) sans texte peut aussi être fort.

À titre d’exemple (en suivre l’esprit sinon la lettre), voici une possibilité pour répartir les élèves entre le rôle de Ludo et celui de Faïza, de façon équitable (l’un ayant plus de texte que l’autre, on veillera à ce que les élèves puissent tous participer au même titre) :

Si le nombre de filles est plus nombreux, on ajoutera un chœur de Faïza sur les monologues pages 58 à 60 en supprimant le court dialogue.

  • de « Chez Anna » au premier « Là-bas, c’est chez moi. » : plutôt en duo afin d’installer la situation et les personnages,

  • puis en chœur de trois ou quatre, les Ludo entrant sur « Là-bas, c’est chez moi. » et prenant le relais en fondu enchaîné, absorbant le premier Ludo dans le groupe, parole laissée aux nouveaux ; de même pour les Faïza, jusqu’à « son armistice avec la vie. »,

  • retour à un autre duo jusqu’à « Dis-moi, Ludo s’il te plaît… »,

  • jusqu’à « Avec Anna. », la Faïza précédente resterait pour assurer la continuité de cette confidence tandis qu’un nouveau chœur de Ludo prendrait en charge la tirade (au passage, distinguer tirade et monologue),

  • une nouvelle Faïza entrerait pour prendre le relais avec « Anna est morte. » avec un seul autre Ludo, malgré la tirade, pour laisser le public dans un rapport plus proche et pour l’étreinte finale (la distribution tiendra compte de ce geste difficile pour les adolescents).

2. Exercices préparatoires possibles

Occupation de l’espace / concentration / travail du collectif /expressivité :

L’adulte se fait le guide à l’aide de consignes courtes avant et pendant : marcher épaules dégagées regard devant soi, occuper tout l’espace, à un claquement de mains s’arrêter, échanger le regard avec celui qui est le plus près, et reprendre l’exercice plusieurs fois. Puis reprendre la marche du plus lent au plus rapide et inversement.

Enfin, répartis dans l’espace, sentir en soi et exprimer un sentiment sur les mots lancés (toutes les positions possibles) : colère, inquiétude, joie, mutisme, tristesse, bonheur, tendresse, etc. Enfin, tous dans l’espace ou en demi-groupe, on diffuse les passages de Bach n°4 puis n°2 (voir Annexe) avec comme consigne : vous êtes Ludo, vous vous déplacez dans l’état où il a pu être à un moment de sa vie.

- Même travail que plus haut sur le chœur : on se reportera aux exercices proposés par Denise Schröfer dans le Carnet artistique et pédagogique de La Terre qui ne voulait plus tourner de Françoise du Chaxel.

3. Répétitions

Une fois la distribution faite, les groupes en chœur rechercheront la répartition de la parole sur les tirades ou monologues la plus juste. Pour faire sentir ce que vivent les personnages, ils s’appuieront sur la ponctuation, les passages à la ligne, les reprises et les répétitions.

  • le duo pages 64-65, le jeu d’Anna par Faïza : changement de voix ou de simple rythme ? Enveloppe ou pas ? En principe non puisque tout cela est raconté que l’enveloppe a été dépensée, à moins que Ludo ait conservé la seule enveloppe comme une relique pliée dans une poche ?

  • le duo pages 66-67, la justesse de la relation entre les deux,

  • le duo pages 69-71, idem et l’expression des rêves fous de Ludo, la proximité de plus en plus grande entre les deux (pour l’étreinte, relire pages 52-53).

Pour tous, en préparation et répétition, points importants :

  • clarifier les adresses au public, celles à l’autre (sans en faire une mécanique),

  • occuper l’espace de la scène : sans doute, sur l’ensemble, aller de placements éloignés de Ludo et Faïza à l’extrême proximité (au théâtre, on peut jouer l’intimité ou la dispute de loin, le spectateur a toujours l’image de l’ensemble du plateau : à différencier du cinéma),

  • « nourrir » le jeu des Faïza souvent à l’écoute, silencieuse mais à l’écoute : travail d’intériorité qui fera naître des regards, sourires, expression de compassion d’inquiétude, etc.,

  • dans les chœurs, pendant qu’un ou une parle, les autres expriment le même état (comme s’ils le disaient),

  • accorder de l’importance aux passages de relais pour qu’ils ne cassent pas l’émotion (chacun n’attend pas d’être placé pour être le personnage),

  • chercher la sincérité de l’ensemble du groupe pour qui il importera moins de faire l’acteur, que de porter collectivement la parole de Ludo et Faïza avec l’envie de la transmettre au public.

Sur les deux dernières pages, on pourrait s’appuyer sur l’un des Préludes et Fugues de Bach (voir Annexes) et le faire monter imperceptiblement jusqu’à « maintenant, j’en ai fait de la musique, Faïza. » (page 71).